samedi 12 octobre 2013

Stars of the stars, de Pénélope Bagieu et Joan Sfar, une bande dessinée attendue d'un duo inattendu


Quand j'ai appris que deux de mes illustrateurs préférés s'associaient pour créer une série de BD, j'ai sauté au plafond, j'étais transportée de bonheur. Et pour vous montrer à quel point je suis sincère dans mon admiration, en témoignent les liens vers les blogs respectifs de ces auteurs, mis dès la création du mien.


J'ai été intriguée par la couverture, qui pourtant me rappelle le cheval de bataille de la Pénélope Bagieu: la femme. En effet, tous les héros de Bagieu sont des héroïnes. Elle-même sur son blog (puis un petit renard depuis quelques temps qui la représente), Joséphine, Eloïse Pinson dans La page blanche, Zoé dans Cadavre exquis.

C'est un premier tome réussi, passé la surprise du scénario un tantinet farfelu (mais au fond, c'est pour ça qu'on aime Sfar).
En même temps, je n'ai pas été surprise de voir que de ce duo rock gloss et antipolitiquement correct, naissait une comédie interstellaire complètement déjantée.

Sfar s'est donc occupé du scénario, et Pénélope des dessins, mais Joan insiste sur l'échange permanent, et le fait qu'ils soient co-auteurs.

Il a toujours eu besoin de mêler le tragique et l'humour, et c'est bien ce que l'on retrouve ici.

L'histoire débute à New York, avec un concours de danse où 7 filles seulement seront sélectionnées. On se croirait dans Fame, et très vite on se dit qu'ils ne vont pas rester dans cette veine Disney bon enfant.

En effet: quelque part dans les étoiles, des extra-terrestres ont décidé de rayer la terre de la carte.
La terre, ils n'en ont cure, ce qui les intéresse, c'est la danse. C'est pour cela qu'ils ont décidé de sauver cinq danseuses et de les prendre avec eux. Ces cinq filles embarquées dans l'espace vont s'entretuer, dans une rivalité et une haine étonnantes (enfin pas tant que ça pour des filles)

Univers apocalyptique donc, d'où vont émerger des questions existentielles: une fois que la terre a explosé, as-tu encore envie de tuer tout le monde? Où se place ton ego? Que vaut ton identité religieuse, géographique quand il n'y a plus rien?
On découvre que ces sept filles viennent d'horizons très différents, comme si chacune représentait un échantillon de l'humanité. Il y a Angoissette, juive de Brooklyn, sorte de Woody Allen au féminin qui se pose rapidement une tonne de questions existentielles dans le cosmos. Il y a Maurice, noire française, brut de décoffrage et de tatouages. Elles sont tellement atypiques qu'elles vont être un tantinet solidaires (et c'est leur maximum): ces filles intersidérantes ne rentrent dans aucun critère, elles n'ont d'ailleurs aucune envie d'être là. Et d'ailleurs c'est un hasard si elles sont restées dans l'école car elles n'ont pas été retenues pour le concours.



Angoissette est la seule à demeurer lucide sur l'absurdité de la situation. A quoi sert une religion, à quoi sert un attachement à un pays, quand tout a été anéanti?

La BD se prête très bien à ce message tragicomique. Sfar veut évoquer le réveil identitaire actuel dangereux, la montée des extrêmes, et montrer qu'au fond toutes ces identités communautaires nous emmerdent.


Alors on danse...