dimanche 30 juin 2013

Lettre à mes tueurs, de René Frégni, un polar marseillais caniculaire et trépidant

Né en 1947 à Marseille, René Frégni a déserté l'armée après de brèves études et vécu pendant cinq ans à l'étranger sous une fausse identité. De retour en France, il a exercé différents métiers avant d'animer des ateliers d'écriture dans les prisons d'Aix-en-Provence et de Marseille où il a pu côtoyer le monde de la pègre et des voyous qu'il connaît bien.
C'est le Parrain des "Pontons flingueurs", il en a l'élégance et le mystère...



 Lettre à mes tueurs se passe à Marseille, évidemment. Sous une canicule accablante et son toit brûlant, le héros est en mal d'inspiration. Pierre, écrivain, se bat avec la page blanche, et se lamente sur sa vie trop paisible. Surgit alors comme un deux ex machina un ami d'enfance, figure du grand banditisme, traqué par la police et le milieu, qui lui demande un "service": il lui confie une cassette et un numéro de téléphone avant de disparaître par les toits...
  L'auteur en mal de fiction devient alors personnage dont la réalité sans concessions le dépassera complètement. Mais pour sauver sa peau, on déploie parfois un talent et une force sans commune mesure.

J'ai beaucoup apprécié partager avec le personnage la traque, avoir le point de vue de mecs en cavale, on sent qu'il y a "du vécu". Le tout baigné du soleil phocéen, c'est juste parfait en ce début d'été. Marseille est l'héroïne principale: le narrateur en est nostalgique, amoureux. Les flics sont inexistants, j'apprends le style de Frégni, et il me plaît.

 Extraits:
    "Je retrouvai l'air libre, la douceur des nuits d'été, le bourdonnement lointain de la ville. Quelques heures de cellule suffisent pour vous faire redécouvrir toute la beauté d'une nuit d'été." (...)
    "Marseille est une ville qui vous enlève le goût de voyager, d'une rue à l'autre vous changez d'odeurs, de bruits, de continents. D'avenues tirées à quatre épingles aussi propres que la Suisse, je débouchais sans les dédales de Naples ou la banlieue d'Alger. vous traversez la terre en une nuit et vous tombez soudain sur des mâts qui se balancent en plein milieu de la ville.
      Au cours de leur voyage les étoiles n'ont pas trouvé plus beau miroir que le Vieux-Port. J'y arrivai à l'instant où le jour redessinait en rose 'église Saint-Laurent et celle des Accoules, et je mourais d'envie de tenir sous mon nez un vrai café.
      Les premiers bistrots sortaient guéridons et fauteuils, quai de Rive-Neuve. Je dépassai la place aux Huiles et allai m'installer au bar de la Marine face aux milliers de voiliers blancs qui dansaient comme autant de mouettes assemblées en un paisible sommeil.
     C'était cela Marseille, le merveilleux sommeil des mouettes au creux du matin rose et cet ami d'enfance qui perdait son sang dans une rue derrière." 

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